Marilyn, encore, et Norma Jeane Baker qui meurt le 5 août 1962. Le poème de Pasolini est dit par le peintre sicilien Renato Guttuso - le tout est extrait de La Rabbia (1963). La traduction française est de Stefano Bevacqua et Annick Bouleau ("Pasolini cinéaste", Cahiers du cinéma, 1981).
Del mondo antico e del mondo futuro / era rimasta solo la bellezza, e tu, / povera sorellina minore, / quella che corre dietro ai fratelli più grandi, / e ride e piange con loro, per imitarli, / e si mette addosso le loro sciarpette, / tocca non vista i loro libri, i loro coltellini, / tu sorellina più piccola, / quella bellezza l’avevi addosso umilmente, / e la tua anima di figlia di piccola gente, / non hai mai saputo di averla, / perché altrimenti non sarebbe stata bellezza. / Sparì, come un pulviscolo d’oro. / Il mondo te l’ha insegnata. / Così la tua bellezza divenne sua. / Dello stupido mondo antico / e del feroce mondo futuro / era rimasta una bellezza che non si vergognava / di alludere ai piccoli seni di sorellina, / al piccolo ventre così facilmente nudo. / E per questo era bellezza, la stessa / che hanno le dolci mendicanti di colore, / le zingare, le figlie dei commercianti / vincitrici ai concorsi a Miami o a Roma / Sparì, come una colombella d’oro. / Il mondo te l’ha insegnato, / e così la tua bellezza non fu più bellezza. / Ma tu continuavi ad esser bambina, / sciocca come l’antichità, crudele come il futuro, / e fra te e la tua bellezza posseduta dal potere / si mise tutta la stupidità e la crudeltò del presente / te la portavi sempre dietro come un sorriso tra le lacrime / impudica per passività, indecente per obbedienza. / Sparì come una bianca ombra d’oro. / La tua bellezza sopravvissuta del mondo antico, / richiesta dal mondo futuro, posseduta / dal mondo presente, divenne così un male. / Ora i fratelli maggiori finalmente si voltano, / smettono per un momento i loro maledetti giochi, / escono dalla loro inesorabile distrazione, / e si chiedono: « È possibile che Marilyn, / la piccola Marilyn ci abbia indicato la strada? » / Ora sei tu, la prima, tu la sorella più piccola, quella / che non conta nulla, poverina, col suo sorriso, / sei tu la prima oltre le porte del mondo / abbandonato al suo destino di morte.
Du monde antique et du monde futur / la beauté seule était demeurée, et toi, / pauvre petite soeur cadette, / celle qui court derrière ses frères plus grands, / et rit et pleure avec eux, pour les imiter, / toi petite sœur plus jeune, / cette beauté-là tu la portais humblement, / et ton âme de fille de petites gens / n’a jamais su qu’elle la possédait, / sinon il n’y aurait pas eu de beauté. / Le monde te l’a enseignée, / ainsi ta beauté est devenue sienne. / De l’effrayant monde antique et de l’effrayant monde futur / la beauté seule demeurait, et toi / tu l’as traînée comme un sourire obéissant. / L’obéissance demande trop de larmes englouties, / de don aux autres, trop de regards joyeux / qui réclament leur pitié! / Ainsi, ta beauté tu l’as emportée. / Elle disparut comme une poussière d’or. / Du stupide monde antique et du cruel monde futur / demeurait une beauté qui n’avait pas honte / de faire allusion aux petits seins de sœur cadette, / au petit ventre si facilement nu. / A cause de cela il y avait de la beauté, / la même que celle des douces filles de ton monde… / les filles de commerçants qui remportent les concours de Miami ou de Londres. / Elle disparut comme une colombe d’or. / Le monde te l’a enseignée, / ainsi ta beauté ne fut plus de la beauté. / Mais tu étais toujours une enfant, / sotte comme l’antiquité, cruelle comme le futur, / et entre toi et ta beauté possédée par le Pouvoir / prit place toute la stupidité et la cruauté du présent. / Tu la portais toujours comme un sourire entre les larmes, / impudique par passivité, indécente par obéissance. / Elle disparut comme une blanche colombe d’or. / Ta beauté qui a survécu au monde antique, / réclamée par le monde futur, possédée par le monde présent, devint un mal mortel. / Maintenant les frères aînés, enfin, se retournent, / suspendent pour un moment leurs jeux maudits, / se détournent de leur inexorable distraction, / et se demandent: « Est-ce possible que Marilyn, la petite Marilyn, nous ait montré la route? » / Maintenant c’est toi, / celle qui ne compte pas, la pauvre, avec son sourire, / c’est toi la première au-delà des portes du monde / abandonné à son destin de mort.